« Heureux si l’on peut un jour dire de lui : En s’en allant il emporta la peine de mort »
Victor Hugo

Robert Badinter est décédé le 9 février 2024. Il est connu pour son combat contre la peine de mort dont il soutient l’abolition devant le Parlement en 1981 alors qu’il est garde des Sceaux et ministre de la Justice.

« Je savais qu’il arriverait à Lyon et j’ai dit au directeur de l’administration pénitentiaire ‘Vous veillerez à ce que Barbie aille au
fort Montluc qui est le lieu de ses crimes… », raconte l’ancien garde des Sceaux. C’est là que furent détenues, et souvent torturées, près de 9 000 personnes entre février 1943 et août 1944. Parmi elles, des résistants dont le plus célèbre est Jean Moulin, mais aussi 44 enfants juifs raflés à Izieu.

Au cours de l’instruction, Robert Badinter apprend que le « boucher de Lyon » est aussi responsable de la déportation de son père Simon, mort en 1943 dans le centre d’extermination de Sobibór. Le 4 juillet 1987, après délibération des juges et jurés, Klaus Barbie est condamné à la réclusion à perpétuité pour avoir commis 17 crimes contre l’humanité. Un verdict synonyme d’une justice morale pour celui qui a porté la loi contre la peine de mort : « J’ai trouvé ça bien. Je me disais, voilà, il n’y a plus de peine de mort, c’est la vraie victoire de la civilisation. Et çame faisait plaisir en hommage à mon père, je me disais voilà ça, c’est bien », dit-il avec émotion.

Le 9 octobre, jour anniversaire de l’abolition de la peine de mort, Robert Badinter entrera au Panthéon. Par ce geste, la nation honorera l’action de celui qui fut l’artisan de l’abolition de la peine de mort en France.

Dans son discours prononcé en septembre 1981 à l’Assemblée nationale Robert Badinter note que : « La France est grande parce qu’elle a été la première en Europe à abolir la torture malgré les esprits précautionneux qui, dans le pays, s’exclamaient à l’époque que, sans la torture, la justice française serait désarmée, que sans la torture, les bons sujets seraient livrés aux scélérats. »

Il note aussi que : « La France a été parmi les premiers pays du monde à abolir l’esclavage, ce crime qui déshonore encore l’humanité. »

Il précise enfin qu’« ilse trouve que la France aura été, en dépit de tant d’efforts courageux, l’un des derniers pays, presque le dernier – et je baisse la voix pour le dire – en Europe occidentale dont elle a été si souvent le foyer et le pôle, à abolir la peine de mort. »

« Demain, grâce à vous, ajoute-il, la justice française ne sera plus une justice qui tue. Demain, grâce à vous, il n’y aura plus, pour notre honte commune, d’exécutions furtives, à l’aube, sous le dais noir, dans les prisons françaises. Demain, les pages sanglantes de notre justice seront tournées. »

Robert Badinter sera panthéonisé dans le même carré que Condorcet, intellectuel, philosophe, défenseur des Noirs, des Juifs, des femmes, abolitionniste convaincu et militant à qui il a consacré un livre avec Elisabeth Badinter, son épouse.
Robert Badinter admirait aussi l’abbé Grégoire, élu du clergé lorrain, figure importante de la Révolution. Un esprit éclairé qui a inspiré, en 1791, la reconnaissance aux juifs des mêmes droits qu’à tous les autres citoyens, l’abolition des privilèges et de l’esclavage.

La date de la cérémonie de panthéonisation est fixée au 9 octobre 2025, coïncidant avec le 44e anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France.

Les restes de Robert Badinter ne seront pas transférés dans la nécropole républicaine et un cénotaphe sera érigé en sa mémoire. Dans son cercueil prendront place sa robe d’avocat, son discours du 17 septembre 1981 devant l’Assemblée Nationale, le livre de Victor Hugo : Choses vues (deuxième tome) dont est tirée la phrase mise en exergue, le livre sur Condorcet qu’il a écrit avec son épouse et Idiss, son livre en hommage à sa grand-mère, Idiss Rosenberg.

Robert Badinter est parti en emportant la peine de mort.

Le CIFORDOM, son Président et ses adhérents s’associent à l’hommage national et à la panthéonisation de Robert Badinter : un grand homme, une conscience française.

Le CIFORDOM, association de Jeunesse et d’Éducation Populaire créée en 1982, engagée en faveur de l’enseignement de l’Histoire de l’esclavage et de la transmission, défend les droits fondamentaux par la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations. Ses actions : le réseau LAM (Lire à la Maison) – la Mission Histoire, Mémoire, Citoyenneté (H.M.C.) – le
prix Littéraire FETKANN ! Maryse Condé – le Concept Dédiscriminer, vont dans ce sens.