« J’essaie de comprendre pourquoi nous -la gauche- qui avons pour idéal de réduire les inégalités, d’améliorer la situation des plus vulnérables, nous n’apportons plus cette parole politique offensive ». C. TAUBIRA (cf.‘’Elle »22/12/2013)

Il n’est pas douteux qu’il faille stigmatiser, avec la dernière énergie, la rhétorique de la haine antisémite dans laquelle a sombré jusqu’au délire l’humoriste DIEUDONNE qui n’hésite pas à reprendre à son compte des fantasmes nazis.

La question de fond reste cependant posée de savoir si la réponse purement répressive pour laquelle a opté, sous pression, Manuel VALLS est de bon aloi.

Quand ce dernier argue du « risque à l’ordre public », pour justifier l’interdiction des spectacles de DIEUDONNE, il nous paraît utile de rappeler, non seulement que les magistrats ont coutume de donner priorité à la liberté d’expression dans un tel cas, mais que la loi de 1972, qui sanctionne le racisme comme un délit ne peut être utilisée de façon préventive. S’il est question de trouble à « l’ordre public », le risque n’existe-il pas d’ailleurs, et à un degré plus élevé encore, à l’occasion des manifestations anti-républicaines animées par la droite dure et le Front National ?

Mais au-delà de ces considérations, avancées par nombre d’observateurs, il y a lieu de questionner plus en profondeur le fait que l’état actuel de notre société se montre malheureusement propice à nourrir un climat de haine et d’hostilité, qui alimente l’inquiétude populaire. On a pu le constater à l’occasion des mouvements de foule des Bonnets rouges et des opposants au le mariage pour tous. Ce climat favorise en outre l’action des lobbies en tout genre.

Si la montée de l’antisémitisme en témoigne, n’en témoigne pas moins celle du racisme anti-Noir, relent d’un imaginaire colonial, dont Christiane TAUBIRA, entre autre, fait les frais, sans que l’on n’ait pu observer pour le coup, ni au niveau du gouvernement, ni globalement au niveau des médias, une réaction de la même ampleur. Et que dire des propos anti-Roms du Ministre de l’Intérieur ?

Comment ne pas voir que la République et la cohésion sociale, qui lui est consubstantielle, sont gravement interpellées par le succès qu’un DIEUDONNE obtient sur Facebook et, plus généralement, par la facilité avec laquelle se libère une parole raciste dans les milieux populaires que désoriente le cours incertain d’une politique gouvernementale décevant leurs attentes ?

L’affaire DIEUDONNE et ses rebondissements exigent que nous œuvrions à redéfinir les enjeux du vivre ensemble, autrement dit la façon dont la République doit se montrer capable d’accueillir et de respecter la diversité des identités qui la constituent. Or, force est de constater que celles-ci, quand elles sont mises en cause, ne sont pas toutes l’objet de la même attention ni de la même émotion de la part des instances officielles.

Il serait malsain et périlleux de ne pas remédier à cet état de chose, témoignant d’un grave déficit de l’instruction civique et de l’éducation. Une première réponse serait de renforcer à l’école l’enseignement historique de tous les crimes contre l’humanité, sans exception, en leur réservant un traitement égal, et en même temps de rester attentif à la qualité des émissions programmées par les médias. Il serait en outre judicieux d’entrer en dialogue avec toutes les femmes et tous les hommes de progrès, de tous milieux culturels et religieux, soucieux de travailler à la mise en œuvre d’un modèle authentiquement républicain.

 

José Pentoscrope, Président du CIFORDOM